Marilyn et John, Bonnie et Clyde, Iggy et Bowie, Yoko et John Lennon, Serge et Jane voire Starsky et Hutch, Ken et Barbie ou Jésus et Marie-Madeleine. Des couples qui ont fait le XXe siècle. Et qui font le XXIe siècle. Des couples mythiques. Des couples rock'n'roll. Des couples au centre de l'expo montée par le collectif More Iso, composé des comparses bruxelloises France Dubois et Katherine Longly, Thelma et Louise de l'obturateur. Bien encadrée de leurs potes mannequins, maquilleurs et accessoiristes. Les deux photographes et leur costumière nous racontent la genèse de leur projet.
Curieux d'avoir choisi comme symbole de votre projet le couple Sid Vicious et Nancy, qui n'est sans doute pas le plus reconnaissable du grand public.
Katherine: D'accord, mais c'est le couple qui évoque le plus le rock'n'roll. Ils en sont de véritables symboles. Avec la drogue, la carrière de Sid au sein des Sex Pistols et le fait qu'on ne saura jamais s'il a ou non tué Nancy, ils sont devenus des icônes. Leur look aussi les ramène super fort à la mode.
Et Jésus, il est rock'n'roll?
Katherine: c'est un clin d'oeil. Mais je pense que si on veut parler des couples qui ont marqué notre génération, il y a tout à fait sa place suite à notre éducation judéo-chrétienne. D'ailleurs, au premier ou au second degré, Jésus aussi est à la mode.
France: Nous avions envie de collaborer ensemble depuis l'école.
Katherine: On voulait vraiment aller en studio avec les lumières, les costumes et tout. Une trentaine de bénévoles ont collaboré au shooting, sur trois week-end intense. Des pros et des amateurs.
C'était parfois difficile de trouver les modèles pour vos couples?
Katherine: durant tout le temps qu'a duré l'élaboration du projet, à peu près un an, dès qu'on sortait dans la rue, c'était comme si on avait des radars. On cherchait partout. Pour Pulp Fiction, par exemple, on n'a pas trouvé. Iggy Pop, on l'a chopé dans un bar. Pour Nancy, la copine de Sid Vicious, le mannequin prévu a oublié le rendez-vous. Alors la coiffeuse est sortie dans la rue et nous a ramené une touriste anversoise qui fonctionne à merveille.
France: parfois on perdait du temps parce que, comme le projet était bénévole, nos mannequins oubliaient certaines indications. Ainsi, Kurt Cobain est arrivé rasé au shooting.
Katherine: on avait aussi lancé des appels sur Facebook et comme le projet était plutôt fun, on a créé un tout petit buzz. Quand on s'est mis à chercher Barbie et Ken, des fans des poupées nous ont contacté. Mais ils avaient plus de 50 ans et étaient bedonnants.
C'était quoi la photo la plus difficile?
France: le plus dur en fait, c'était de trouver la bonne pause. Et dans ce cas-là, je crois que le plus complexe a été Thelma et Louise, car nous étions les mannequins.
Katherine: Iggy et Bowie nous ont aussi donné pas mal de fil à retordre.
France: la lumière, c'était pas facile non plus.
Katherine: oui, parce qu'on voulait que ça soit iconique.
Pour les costumes, comment avez-vous travaillé? Ils donnent aussi toute leur identité à leur modèles.
Els De Clercq: C'était un vrai défi. On a joué la débrouille, j'ai beaucoup chiné. J'ai aussi «emprunté» des accessoires ou des vêtements en magasin, qui étaient largement trop chers pour notre budget. Et puis j'ai cousu et beaucoup ajusté en plein shooting. Je suis assez fier de ma veste en peau de serpent pour le Nicolas Cage de Sailor et Lula.
Katherine: et puis on a même un gamin de 8 ans qui nous a prêté son sabre laser de Star Wars. Il voulait savoir ce qu'on allait en faire et toucher des droits sur les photos!
Comment vit un photographe artistique aujourd'hui en Belgique?
Katherine: déjà, même si je bosse beaucoup, je me lève beaucoup plus facilement depuis que j'ai quitté mon boulot à la ville!
France: je travaille aussi beaucoup plus que quand j'étais employée mais c'est une vraie passion. On peut aussi multiplier les contrats pub pour vivre. Parce qu'une expo, c'est cher. Près de 3.000€. Alors on a des mécènes.
Justement, pouvez-vous vivre de votre art?
France: si tu rentres dans le circuit des galeries et que tu fais de la rareté, tu peux en vivre. C'est pourquoi je numérote mes tirages en les limitant à 15. Comme ça, ce ne sont pas des posters Ikea. On fait pas du H&M, mais du Dior, si je puis dire.
Katherine: moi je refuse de numéroter. Même si je limite mes tirages: le but n'est quand même pas de vivre de la même série pendant 20 ans.
France: Le plus difficile, c'est de percer dans ce petit milieu. Car on n'envoie pas son CV et ses projets en galerie car, en général, les galeristes aiment leur statut de «découvreurs»: ce sont eux qui doivent venir te chercher.
Pour nous donner une idée, combien coûtera un tirage de l'expo «Rock me to Heaven»?
450€ pièce. Au format 1m sur 70cm. Mais l'important, c'est quand même pas ça. C'est de continuer à progresser, à travailler ensemble. Ou pas.
Interview:
Julien RENSONNET
+ Rock me to Heaven, samedi 7 et dimanche 8 mai de 14 à 20h à la Tower's Art Gallery (TAG), Passage Rogier 1020 Bruxelles. Vernissage de l'expo le vendredi 6 mai suivi d'une soirée rock'n'roll animée par le DJ Mister Soup.
+ Renseignement sur la page Facebook du projet
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